Un nombre croissant d’experts avertit que la fraude alimentaire siphonne discrètement jusqu’à 50 milliards de dollars chaque année de l’industrie alimentaire mondiale, posant également de sérieux risques pour la santé des consommateurs. Des initiés de l’industrie suggèrent que la technologie blockchain pourrait constituer une solution pour prévenir les produits contrefaits ou adulterés. Cependant, déployer de tels systèmes dans des chaînes d’approvisionnement complexes nécessite des investissements importants et une stratégie soigneuse. L’impact de la fraude alimentaire La fraude alimentaire consiste à tromper les acheteurs sur le contenu de leur nourriture. Elle va du mélange d’huiles bon marché dans l’huile d’olive à l’ajout de substances dangereuses comme la mélamine dans le lait. Par exemple, un scandale laitier en Chine en 2008 aurait causé des maladies chez plus de 300 000 nourrissons. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la fraude alimentaire est l’acte intentionnel de tromper les consommateurs concernant la qualité ou la composition des aliments achetés. Bien que la fraude alimentaire ne représente qu’une petite partie du secteur alimentaire de 12 000 milliards de dollars, son impact économique rivalise avec celui d’un pays comme Malte. La confiance des consommateurs diminue, les marques en souffrent, et même les fermes ou magasins légitimes subissent des répercussions lors de scandales de fraude. Des cas récents de fraude alimentaire ont été documentés en Asie et dans la région Asie-Pacifique. (Source : FAO) La blockchain améliore la transparence La blockchain fonctionne comme un registre public où chaque étape de la chaîne d’approvisionnement est enregistrée et sécurisée. Walmart, par exemple, a utilisé Hyperledger Fabric pour tracer du porc en Chine et des mangues aux États-Unis, réduisant ainsi le temps de traçabilité de plusieurs jours à quelques secondes. Cela permet d’identifier immédiatement les produits contaminés entrant dans la chaîne. Une fois enregistrés, les données sur la blockchain ne peuvent ni être modifiées ni supprimées, fournissant aux consommateurs et aux inspecteurs un enregistrement immuable, du fermier au consommateur. Des experts en technologie pensent qu’une telle transparence dissuade les fraudeurs qui comptent sur le secret. Les autorités décrivent la fraude alimentaire comme la représentation mensongère intentionnelle de produits alimentaires — que ce soit par l’ajout d’ingrédients moins chers, le remplacement par des produits inférieurs ou la falsification d’étiquettes — dans le but de tromper les consommateurs pour obtenir un gain financier. (Image : Gemini. ) Les défis liés au coût et à la complexité Cependant, la mise en œuvre de solutions blockchain n’est ni bon marché ni simple. Les entreprises doivent supporter le coût du matériel, des logiciels, des formations et des capteurs nécessaires pour saisir les données sur la blockchain.

Des dispositifs défectueux ou falsifiés peuvent compromettre l’intégrité des données. Les oracles, qui relient les événements du monde réel à la blockchain, sont vulnérables aux piratages. De plus, certaines entreprises hésitent à partager des informations détaillées pour des raisons de compétitivité. La réglementation concernant la blockchain et la traçabilité alimentaire reste floue dans de nombreuses régions. Coordonner tous les acteurs — des agriculteurs et transporteurs aux détaillants — demande beaucoup de temps et de ressources financières. Des estimations indiquent que le lancement d’un système à grande échelle peut coûter plusieurs millions de dollars aux principaux intervenants. Progresser dans l’adoption Des organisations comme TE-Food, Provenance, ainsi que des groupes industriels, mènent des projets pilotes impliquant des agriculteurs, des distributeurs et des détaillants pour tester les applications de la blockchain. Des formations sont en cours. Certains gouvernements de l’UE et d’Asie évoquent une régulation plus claire de la traçabilité alimentaire. Les experts recommandent de commencer par de petits projets ciblant des produits ou régions spécifiques afin d’en démontrer rapidement la valeur. Des pilotes réussis pourraient encourager une participation plus large. Perspectives d’avenir La fraude alimentaire demeure un défi majeur. Bien que des outils comme la blockchain offrent un potentiel réel pour la combattre, ils impliquent des coûts élevés. Une utilisation efficace de la blockchain requiert de remédier aux faiblesses dans la surveillance de la chaîne du froid, de briser les silos de données et de clarifier la réglementation. Investir dans des capteurs fiables, des oracles sécurisés et favoriser de solides collaborations est essentiel. Lorsque ces éléments seront alignés, la blockchain pourrait réduire considérablement la fraude alimentaire. En attendant, la protection des consommateurs et la sécurisation de l’approvisionnement alimentaire restent des enjeux exigeants. Image ph. : SafeFood ; graphique : TradingView